Français - Open Forum for CSO Development Effectiveness

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NOTES DE L’INTERVENTION DE MAINA KIAI,
RAPPORTEUR SPECIAL DES NATIONS-UNIES SUR LE
DROIT D’ASSOCIATION ET DE REUNION PACIFIQUE
BUSAN, COREE DU SUD
Tout d’abord, un grand merci pour cette invitation et l’opportunité qui m’est donnée de m’adresser à vous
à l’occasion de cette séance d’ouverture du Forum mondial de la société civile à Busan. J’aimerai
remercier en particulier les principaux organisateurs de cet évènement : Better Aid, le Forum ouvert, et le
Forum de la société civile de Corée sur la coopération au développement international.
De même, je souhaite rendre hommage aux incroyables efforts d’un nombre d’organisations de la société
civile qui ont œuvré ces trois dernières années – depuis la réunion d’Accra en septembre 2008 - afin
d’améliorer l’engagement de celle-ci dans les débats internationaux sur l’efficacité de l’aide.
Les états et les donateurs ont pris d’importants engagements au 3 ème Forum de haut niveau à Accra il y a
trois ans. Les groupes de la société civile ont finalement été reconnus comme acteurs du développement
indépendants et à part entière. Le Programme d’action d’Accra prévoit clairement que les donateurs et les
pays bénéficiaires doivent approfondir leurs liens avec les OSC et offrir un environnement propice à
l’optimisation de leurs contributions.
La société civile est de fait un acteur et un partenaire clé dans le développement de n’importe quel pays.
Dans mon pays, le Kenya, les organisations de la société civile fournissent une scolarité dans les
bidonvilles et les régions rurales, développent les capacités des agriculteurs, facilitent l’accès aux soins,
etc. Ils jouent un rôle important dans la promotion d’une citoyenneté active qui participe au
développement démocratique du pays. Ce double rôle des OSC, d’un côté celui d’offrir des services, et
de l’autre celui du suivi et des plaidoyers, est primordial à l’accomplissement des droits humains dès lors
que ces droits sont universels, indivisibles, interdépendants, et nécessaires au développement humain.
Les évènements récents au Proche-Orient et en Afrique du nord ont souligné cette dualité de façon
marquée. Le « développement » en tant que concept doit être défini de manière holistique et mettre
l’accent sur les droits et libertés démocratiques afin de garantir l’équité et la responsabilité. Il est clair que
le printemps arabe a trouvé ses racines à la fois dans les appels à un « développement traditionnel », et
dans les appels à la liberté. La conjoncture des deux a été essentielle au soulèvement des millions de
personnes qui sont descendus dans la rue pour revendiquer leurs droits inaliénables. Afin de garantir le
progrès vers l’avènement des droits économiques, sociaux, et culturels, il faut un haut niveau de
responsabilité et de transparence reposant sur les libertés civiles et politiques.
D’ailleurs, l’histoire récente de notre pays hôte, la Corée, souligne également le lien entre développement
et liberté, et il ne fait aucun doute que la Corée ne serait pas là où elle est aujourd’hui sans les efforts
concertés d’OSC travaillant dans une approche dualiste.
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Le Forum remercie Sophia Witzig et Michel Wong Man Wan qui ont traduit ce document de l’anglais vers le français !
Cependant, l’engagement à protéger les OSC a été fréquemment rompu par des gouvernements à travers
le monde. En plus des méthodes traditionnels pour restreindre l’activité de la société civile telles que
l’intimidation et les arrestation arbitraires, nous avons assisté à une prolifération de restrictions juridiques
et politiques tendant à empêcher la société civile de prendre part aux activités liées à la dépense,
l’utilisation, et le suivi de l’aide. Et souvent, il est à constater que les états qui ne parviennent pas à tenir
leurs engagements envers leurs citoyens – que ce soit en raison de la corruption, d’incapacité, ou d’avidité
– sont les mêmes où l’espace démocratique est étroit.
L’existence d’institutions démocratiques et des libertés d’expression et d’association est essentielle à un
développement holistique et sensé. En effet, seules ces institutions et ces libertés peuvent garantir une
prise en compte appropriée des statistiques de développement, de la nécessité d’une attention particulière
portée à l’égard des plus vulnérables et marginalisés, et des impératifs liés à une utilisation optimale des
fonds de développement.
Au cours des dernières années, l’Equipe de travail sur l’Efficacité du développement des OSC et
l’Environnement propice, co-présidée par la Suède (Sida), le Mali (l’Office du Président), et le Conseil
canadien pour la coopération internationale (CCCI, représentant le Forum ouvert pour l’efficacité du
développement des OSC), a développé un document très important comportant des messages clés pour le
Quatrième forum de haut niveau.
Un message sur lequel j’aimerai attirer votre attention est celui où l’Equipe de travail appellent les
donateurs et les pays bénéficiaires à « offrir, promouvoir, et assurer le maintien d’un environnement
propice aux OSC permettant d’optimiser leurs contributions au développement ».
Ce message s’adresse en particulier aux états pour qu’ils s’engagent et promeuvent « un environnement
propice aux OSC en tant qu’acteurs indépendants du développement, à la fois d’un point de vue juridique
et pratique, et ceci de manière au moins conforme aux engagements existants contenus dans les
instruments internationaux et régionaux qui garantissent les droits fondamentaux. Ceux-ci incluent : la
liberté d’association, la liberté d’expression, le droit d’agir librement sans ingérence injustifiée de l’état,
le droit de communiquer et de coopérer, le droit de chercher et d’obtenir des financements, et le devoir de
l’état de protéger l’espace de la société civile.
L’environnement propice à la société civile peut être créé en améliorant le dialogue entre la société civile
et les gouvernements. Ce FHN nous offre l’opportunité d’un tel dialogue, et je vous encourage à l’utiliser
au mieux, car les alternatives sont souvent plus compliquées, difficiles, et très coûteuses, comme nous
l’enseigne le printemps arabe.
L’environnement propice peut aussi être atteint à travers un processus participatif dans le but de créer un
droit régissant le secteur de la société civile. Les bénéficiaires de ce droit devraient alors occuper une
place CENTRALE dans la rédaction de ces règles, sous peine de voir ce processus être source de conflits,
et pire, limiter les apports pour le citoyen ordinaire au service duquel il est sensé être.
Donc, et je tiens à mettre l'accent dessus, les gouvernements doivent assurer la protection de certains
principes internationaux essentiels : la liberté d'association, la liberté d'expression, la liberté de réunion,
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Le Forum remercie Sophia Witzig et Michel Wong Man Wan qui ont traduit ce document de l’anglais vers le français !
les droits des groupes de la société civile à chercher et obtenir des financements, et le devoir de l'État de
protéger ces libertés et ces droits.
Mais nous, dans le monde des OSC, devons aussi intégrer des devoirs dans notre travail et notre
plaidoyer. De la même manière que nous exigeons des gouvernements plus de transparence et une
approche du développement et de l'assistance basée sur les droits, en tant qu'OSC, nous devons faire de
même. Dans tout travail que nous effectuons pour les pauvres et les gens ordinaires, nous devons être
guidés par les principes des droits humains du début à la fin.
Cela signifie que nous devons faire preuve de transparence dans notre travail et dans nos finances. Cela
signifie que nous devons être inclusifs, attentifs aux besoins des plus faibles et des marginalisés, que nous
devons mettre en exergue la diversité au sein de nos équipes, de nos sites et de nos bénéficiaires, et que
nous devons nous rendre responsables non seulement face aux donateurs mais surtout face aux personnes
avec qui et pour qui nous travaillons. Mais cet appel pour plus de transparence et de responsabilité ne doit
pas être utilisé comme pretexte par les gouvernements pour attaquer et restreindre le travail des OSC.
Et cela veut dire que nous devons être créatifs et souples dans ce que nous faisons, en gardant à l'esprit
que ce qui marchait il y a dix ans pourrait ne pas fonctionner aujourd'hui. Il se peut même que les
tactiques et stratégies que nous avons utilisées il y a cinq ans ne soient plus adaptées en raison des
changements de dynamiques. Pour cela, nous devons être aussi organiques que possible, en restant à
l'écoute de ceux avec qui nous travaillons et en les laissant décider de certains ordres du jour pour nous.
Et je veux envoyer un message semblable aux donateurs. Depuis 2005, les donateurs, tout en augmentant
les niveaux d'aide de manière générale – et nous devons les saluer pour cela – ont semble- t'il préféré
financer les gouvernements, et les organes internationaux comme le PNUD, aux dépens des ONG. Il ne
devrait pas y avoir de choix à faire. Mais il est clair qu'un engagement plus stratégique et plus souple de
la part des donateurs est nécessaire auprès des OSC qui promeuvent leur travail et leur rôle en tant
qu'acteurs du développement à part entière, tout en évitant de rendre l'accès aux financements pour les
OSC encore plus difficile, long et bureaucratique.
C'est surtout le cas dans les pays pauvres et fragiles où la gouvernance est incertaine, et axée sur un
travail pro-démocratique. Souvent dans ces pays des changements de circonstances, la plupart du temps
négatifs, signifient que les priorités des OSC doivent changer. Les priorités changent rapidement avec les
circonstances, et quand les donateurs sont pris dans des cycles prédéterminés, les OSC ont du mal à
réagir. C'est ce qui s'est passé au Kenya en 2007/8 quand la guerre civile a presque éclaté : si quelques
donateurs n'avaient pas voulu ou pu redistribuer leurs financements au plus vite afin de soutenir les OSC
sur la ligne de front, je peux dire que peut-être une guerre civile aurait éclaté.
J'espère que le Forum de Haut Niveau, qui commence dans trois jours, tiendra compte de ces messagesclés développés par l'Équipe de Travail grâce à des consultations auprès de différentes parties prenantes
ces dernières années.
Enfin, permettez-moi de dire que dans mon rôle de Rapporteur Spécial des Nations Unies, je me vois
comme votre outil en vue d'améliorer votre travail, soutenir vos demandes pour plus d'espace, et de
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Le Forum remercie Sophia Witzig et Michel Wong Man Wan qui ont traduit ce document de l’anglais vers le français !
manière générale, pour contrôler ce que les acteurs étatiques et non-étatiques font en rapport aux Droits
de réunion et d'association. Je vous en prie, utilisez-moi. Harcelez-moi. Submergez-moi de vos plaintes,
problèmes et contributions. Ils sont tous bienvenus.
À cet égard, mon bureau à Genève devrait avoir posté à présent des questionnaires sur le site internet du
HCDH au sujet de la loi, des pratiques et de la réalité du droit de réunion et d'association. Veuillez les
consulter et les remplir. C'est un outil très important non seulement pour comprendre les meilleures
pratiques, mais aussi les pires, et j'inclurai les réponses dans mon rapport du HCDH en juin l'année
prochaine
Enfin, enfin, laissez-moi vous souhaiter de bonnes et fructueuses délibérations dans ce forum et dans le
prochain. Je suis désireux de voir les résolutions de cette réunion, et je ferai mon possible pour les suivre.
Merci
Novembre 2011
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